Génération perdue qui s’interroge

Ah la diaspora africaine en France !

Je vis en France depuis 10 ans, j’en ai même acquis la nationalité. J’aime vivre dans ce pays à cause de la sécurité qu’il semble offrir comparé à mon pays d’origine. J’y travaille depuis 7 ans, mais plus le temps passe, plus je m’interroge. Je m’interroge sur des questions qui ne sont pas nouvelles dans ce monde, mais qui sont vraiment nouvelles pour moi. Le plafond de verre est-il noir ?

Le plafond de verre : « tout cas où un individu est confronté à un réseau de pouvoir tacite, implicite, voire occulte, qui l’écarte d’un niveau de pouvoir ou de rémunération ou hiérarchique auquel il pourrait prétendre ». J’y ai souvent entendu parlé sans y avoir été directement confrontée. « Nous les noirs devons bosser deux fois plus que les autres afin d’avoir une chance d’accéder à une promotion ». Toujours ce besoin de justifier notre légitimité. Nul n’est parfait, mais pourquoi ai-je l’impression que les moindres failles des noirs sont facilement mises à jour afin de justifier une non ascension vers un poste de responsabilité ? J’ai bien vu des collègues blancs avoir une promotion malgré quelques axes d’amélioration sur tel ou tel domaine. Alors pourquoi un axe d’amélioration chez un noir est une raison suffisante pour ne pas le faire évoluer ? A vrai dire je ne me souviens pas avoir vu une personne « parfaite » accéder à un poste de responsabilité. Au contraire, ce ne sont pas les meilleurs qui progressent. Ce sont ceux qui ont du réseau dans les hautes sphères, ceux qui sont persuasifs et qui savent bien vendre leur travail, ceux qui ont réponse à tout même quand ils n’en savent absolument rien.

Et même une fois l’accession à un poste de responsabilité acquise ! Le combat quotidien pour justifier sa légitimité continue. J’ai vu tel chef noir se faire destituer parce que ses collaborateurs blancs ont réussi à convaincre leur N+2 blanc que ledit chef n’était pas compétent. Des témoignages de ce type j’en ai dans les domaines financiers, scientifiques et même hospitaliers. C’est si frustrant. Que faire ?

Continuer de se battre ? La tonne d’efforts demandée en vaut-elle la peine, dans une vie ? Concours, études, diplômes, certifications prestigieuses, des centaines de candidatures pour un poste finalement en inadéquation avec ses qualifications. Et au quotidien : humilité, multiples efforts d’intégration, modification de son accent pour mieux se faire entendre, différences culturelles, solitude culturelle. La force psychologique de l’homme noir, en parlera-t-on un jour ? Celui qui n’ose pas dire « non » à un travail dénigré. Celui qui a peur de se tromper et donc préfère timidement se taire. Celui qui se sent d’emblée inférieur à son homologue blanc. Les séquelles de l’esclavage seraient-elles restées dans nos gènes ? J’aimerais tellement savoir ce qu’en pensent les blancs en toute sincérité. Autant nous avons le faux réflexe de nous sentir inférieurs, autant ont-ils le leur de se sentir supérieur ? Est-ce d’emblée frustrant pour les blancs de se faire diriger par un noir ? Est-ce un sentiment d’échec pour eux ? Tant de préjugés, de frustrations, de combats quotidiens.

Je sais d’où je viens. Mais je ne sais pas où je vais. Ai-je ma place au sein d’une entreprise française ? Pourrais-je vraiment y évoluer ? Le modèle salarié convient-il aux noirs en France? Est-ce que je dérange ? Puis-je les comprendre, après tout c’est leur pays ?

Devrais-je rentrer dans mon pays d’origine? Pourquoi ce sentiment de décalage avec mon pays d’origine? A cause du système d’insécurité, de corruption et de favoritisme sur place? Mais au fait, ce sytème, qui l’a instauré? Les séquelles du colonialisme et la françafrique peut-on en parler?

Ah! Génération perdue qui s’interroge.

One comment

  1. J’aime beaucoup votre blog. Un plaisir de venir flâner sur vos pages. Une belle découverte. blog très intéressant. Je reviendrai. N’hésitez pas à visiter mon univers. Au plaisir

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